
Atelier philo: quelle est la différence entre négociation et chantage?
Il y a quelques semaines, comme l’a raconté notre collègue Valérie, deux pandas qui avaient été prêtés par la Chine aux États-Unis sont rentrés chez eux plutôt que prévu, dans le cadre de ce qu’on a appelé la «diplomatie des pandas». Dans un contexte plus «sérieux», comme l’a expliqué notre collègue Maël, des otages du Hamas ont été libérés en octobre, dans le cadre du conflit avec Israël. Cela soulève un enjeu commun aux deux actualités : celui du chantage. Voici une activité qui vous permettra de faire réfléchir vos élèves et de les aider à délimiter cette notion importante.
En effet, en tant qu’enseignant.e, vous n’êtes pas sans savoir que vos élèves sont régulièrement confronté.es à une constellation de situations, qui « orbitent » - directement ou indirectement - autour de plusieurs notions liées au chantage et à la négociation : donner, échanger, promettre, négocier, s’intégrer, persuader, concéder, sacrifier, la liste est longue!
Type de tâche: Atelier philo
Durée approximative: 50 minutes

Liens avec le programme
Le programme du cours de CCQ n’aborde pas la notion de chantage en tant que thématique à part entière. Cela ne vous empêche évidemment pas d’aborder ce sujet si vos élèves souhaitent y réfléchir. Dans la mesure où réfléchir, c’est notamment faire des liens et de tenir compte de contextes différents, l’actualité offre souvent l’occasion aux élèves de s’interroger sur les enjeux liés à cette question.
En outre, sachez que dans la section du programme de CCQ relative à l’éducation sexuelle, deux sujets peuvent aussi offrir l’opportunité de l’aborder.
Il y a d’abord celui de la manipulation et du chantage affectifs. L’enjeu pour les enfants est de pouvoir identifier les actes qui visent à assujettir une autre personne à ses propres désirs par un abus de pouvoir, par l’utilisation de la force ou de la contrainte ou sous la menace, implicite ou explicite. Réfléchir aux mécanismes du chantage apparaît donc pertinent en matière de prévention de situations ou de comportements abusifs.
Ensuite, en 4e année, les thématiques de l’influence du groupe et de la différence entre l’amour et l’amitié visent à aborder :
- les attitudes et les comportements qui influencent les relations interpersonnelles,
- les émotions et les sentiments en amitié et en amour,
- les mésententes et conflits.
Comment ne pas voir là également une opportunité pour vos élèves de réfléchir à ce qui caractérise le chantage? Afin d’apprendre à le distinguer des mots – et des enjeux - qui en sont proches. Car s’ils les apprivoisent davantage, ils et elles seront plus à même d’exercer leur liberté, de poser des choix équilibrés et d’assurer le respect de leurs limites et de leur intégrité.
Consignes
Proposez à vos élèves de lire les articles «Chicane de pandas entre la Chine et les États-Unis!» et «Le Hamas a libéré 4 otages». Demandez-leur ensuite de formuler, par petite équipe de deux, une question philosophique.
Les critères d’une telle question sont simples :
- elle doit être ouverte
- elle n’a pas une seule « bonne » réponse ni de réponse définitive
- elle doit pousser à la réflexion
- elle doit être universelle (autrement dit, concerner tout le monde).
En choisissant une de leurs questions, proposez-leur alors un moment de discussion dont le but n’est pas de trouver la bonne réponse ni de convaincre les autres de penser comme elles ou eux. Mais plutôt de donner du sens, ensemble, à une question complexe.
Voici une liste de questions qui pourraient vous être utiles pour relancer les échanges de vos élèves. Vous n’êtes pas obligé.es de toutes les utiliser évidemment ! Vous êtes libres d’en piger quelques-unes, en fonction des directions empruntées avec vos élèves dans la discussion.
En somme, elles sont juste là en cas de besoin, afin d’amener vos élèves à approfondir ou à nuancer leurs réflexions. Mais aussi à développer – et oui ! - leur sens critique.
- Si un.e ami.e te demandais de lui donner des bonbons, faute de quoi il/elle ne serait plus ton ami.e, comment réagirais-tu ?
- Si un.e ami te propose d’échanger un objet qui a de la valeur pour toi, y a-t-il des façons plus acceptables que d’autres pour que tu acceptes cet échange ?
- Que signifie le mot « chantage » ?
- Quand on veut s’intégrer dans un groupe, y a-t-il des limites à ce qu’on devrait accepter de faire ?
- Quelle est la différence entre insister et faire pression ?
- Quelle est la différence entre convaincre et manipuler ?
- Quelle est la différence entre un avertissement et une menace ?
- Quelle est la différence entre une concession et un sacrifice ?
- Y a-t-il des choses qui sont plus faciles à donner qu’à recevoir ?
- Y a-t-il des choses qui sont plus faciles à recevoir qu’à donner ?
- Quand on est amoureux de quelqu’un, comment faire la différence entre une demande acceptable et une demande inacceptable?
- Quand des personnes sont prises en otage et qu’on souhaite qu’elles soient libérées, comment faire la différence entre une demande acceptable et une demande inacceptable?
- Nos relations avec les autres nous amènent-elles parfois à relativiser l’importance qu’ont certaines choses pour nous?
- Dans nos relations avec les autres, peut-on apprendre à faire des compromis ?
Si vous n’avez jamais mené de discussion philo avec vos élèves, voici quelques repères pour que celle-ci se déroule au mieux.
La philo : comment on fait ?
- Faire de la philo ce n’est pas juste parler, discuter ou dire ce qu’on pense. Ce n’est pas non plus empiler ou juxtaposer des opinions ou des idées, en prenant un air sérieux. C’est autre chose : il s’agit plutôt d’un dialogue, où on essaie de penser ce qu’on dit. Et pas juste de dire ce qu’on pense !
- Pour penser de façon critique, on peut s’appuyer sur des habiletés de pensée comme : définir les mots dont on parle, donner des exemples et des contre-exemples, mais aussi réfléchir aux conséquences et aux implications de ce qu’on dit.
- D’autres aptitudes sont importantes à développer : reformuler ses idées ou celles des autres (pour s’assurer qu’on se comprend bien), donner des raisons quand on avance une idée, ou encore identifier des critères permettant de classer nos idées et de les distinguer entre elles.
- En philosophie, il est primordial de se méfier des évidences, des réponses toutes faites et des vérités qu’on voudrait nous imposer. On essaie autant que possible de décrypter et de déconstruire les préjugés, les stéréotypes et idées présentées comme « l’évidence », le « gros bon sens » ou « ce que tout le monde sait ».
- En philosophie, le but n’est pas de convaincre, mais de comprendre. C’est aussi de comprendre en quoi les sujets dont on parle et les questions qui en découlent nous concernent toutes et tous.
Une chose essentielle : on découvre petit à petit qu’il est impossible (et heureusement !) d’arriver à des réponses qui sont « bonnes », définitives ou identiques pour chacun. Les réponses deviennent plus comme un horizon vers lequel on tend plutôt que comme un résultat qu’on voudrait obtenir.
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