
La fièvre du hockey: Pourquoi (presque) tout le monde s’enflamme?
Au Québec, le hockey occupe une place bien particulière dans la culture collective. Quand l’équipe du Canadien accède aux séries éliminatoires, c’est tout un peuple qui vibre à l’unisson: on voit des rues animées, des familles et des amis réunis, des émotions partagées à grande échelle. Même ceux qui ne suivent pas toujours le hockey se laissent parfois gagner par la fièvre ambiante. Mais qu’est-ce qui explique ce phénomène d’enthousiasme collectif? Pourquoi a-t-on l’impression que tout le monde ne parle que de hockey, que la victoire ou la défaite de l’équipe devient l’affaire de tous?
Ce genre de vague d’émotions partagées n’est pas réservé au sport: elle se retrouve aussi lors de grands concerts, de fêtes populaires ou de mouvements sociaux. Ces moments peuvent nous permettre de réfléchir à la force du groupe, au besoin d’appartenance, à la manière dont les émotions circulent et se propagent d’une personne à l’autre. Est-ce la passion pour le jeu, la fierté d’être ensemble ou simplement l’envie de ne pas se sentir à l’écart qui nous pousse à suivre la foule?
La fièvre du hockey offre une occasion précieuse d’explorer avec les élèves les dynamiques de groupe, l’influence des modes, la construction de l’identité collective et le pouvoir des émotions partagées. Elle invite à s’interroger sur ce que l’on gagne à vivre ces moments ensemble, mais aussi sur ce que l’on risque de perdre si on se laisse emporter sans prendre de recul ou sans respecter ses propres limites.
À travers cette activité, les élèves sont invités à explorer ce qui se cache derrière la «fièvre du hockey»: pourquoi les foules s’enflamment, ce que l’on gagne à partager une émotion collective, mais aussi ce que l’on risque parfois de perdre si l’on suit la vague sans réfléchir. Ils pourront ainsi mieux comprendre les dynamiques de groupe, la construction de l’identité collective et l’importance de garder un esprit critique, même quand l’enthousiasme est à son comble.
Type de tâche: Atelier philo
Durée approximative: 60 minutes
Déroulement
Dans votre classe, il y a assurément des fans du CH! Demandez-leur de formuler, en petite équipe, une question philosophique autour de ce drôle de phénomène émotionnel particulier.
Les critères d’une telle question sont simples:
- elle doit être ouverte
- elle n’a pas une seule «bonne» réponse ni de réponse définitive
- elle doit pousser à la réflexion
- elle doit être universelle (autrement dit, concerner tout le monde).
En choisissant une de leurs questions, proposez-leur alors un moment de discussion dont le but n’est pas de trouver la bonne réponse ni de convaincre les autres de penser comme elles ou eux. Mais plutôt de donner du sens, ensemble, à une question complexe.
Voici une liste de questions qui pourraient vous être utiles pour relancer les échanges de vos élèves. Vous n’êtes pas obligé.es de toutes les utiliser évidemment! Vous êtes libres d’en piger quelques-unes, en fonction des directions empruntées avec vos élèves dans la discussion.
En somme, elles sont juste là en cas de besoin, afin d’amener vos élèves à approfondir ou à nuancer leurs réflexions. Mais aussi à prendre conscience qu’ils sont capables de réfléchir et de donner du sens à une question qui les concerne toutes et tous:
1. Pourquoi tant de gens se passionnent-ils soudainement pour le hockey quand leur équipe gagne?
2. Est-ce qu’on peut vraiment aimer un sport ou une équipe juste parce que tout le monde en parle autour de nous?
3. Qu’est-ce que ça fait de partager une émotion forte avec une foule entière?
4. Est-ce que parfois on se sent obligé d’être enthousiaste pour ne pas être différent des autres?
5. Les modes et les vagues d’enthousiasme rendent-elles les gens plus soudés ou plus influençables?
6. Est-ce facile de rester soi-même quand tout le monde autour de nous s’emballe pour la même chose?
7. Est-ce qu’on peut vraiment choisir de ne pas se laisser emporter par l’enthousiasme collectif, ou est-ce que c’est parfois plus fort que nous?
8. Qu’est-ce qu’on ressent quand la vague d’enthousiasme retombe et que tout redevient «normal»?
9. Est-ce qu’il est possible de ne pas aimer le hockey au Québec sans se sentir exclu ?
10. Quelle différence y a-t-il entre «être» exclu et «se sentir» exclu?
11. Quand tout le monde partage la même émotion, est-ce qu’on ne risque pas d’oublier ou d’exclure ceux qui ne ressentent pas la même chose?
12. Les émotions qu’on ressent dans un groupe sont-elles plus fortes que celles qu’on vit seul?
13. Est-ce que se laisser emporter par la foule, c’est plutôt une force ou plutôt une faiblesse?
14. Pourrait-on parfois utiliser la force de l’enthousiasme collectif pour faire avancer des causes ou améliorer la vie de tout le monde?
La philo: comment on fait?
- Faire de la philo ce n’est pas juste parler, discuter ou dire ce qu’on pense. Ce n’est pas non plus empiler ou juxtaposer des opinions ou des idées, en prenant un air sérieux. C’est autre chose: il s’agit plutôt d’un dialogue, où on essaie de penser ce qu’on dit. Et pas juste de dire ce qu’on pense!
- Pour penser de façon critique, on peut s’appuyer sur des habiletés de pensée comme: définir les mots dont on parle, donner des exemples et des contre-exemples, mais aussi réfléchir aux conséquences et aux implications de ce qu’on dit.
- D’autres aptitudes sont importantes à développer: reformuler ses idées ou celles des autres (pour s’assurer qu’on se comprend bien), donner des raisons quand on avance une idée, ou encore identifier des critères permettant de classer nos idées et de les distinguer entre elles.
- En philosophie, il est primordial de se méfier des évidences, des réponses toutes faites et des vérités qu’on voudrait nous imposer. On essaie autant que possible de décrypter et de déconstruire les préjugés, les stéréotypes et idées présentées comme «l’évidence», le «gros bon sens» ou «ce que tout le monde sait».
- En philosophie, le but n’est pas de convaincre, mais de comprendre. C’est aussi de comprendre en quoi les sujets dont on parle et les questions qui en découlent nous concernent toutes et tous.
- Une chose essentielle: on découvre petit à petit qu’il est impossible (et heureusement!) d’arriver à des réponses qui sont «bonnes», définitives ou identiques pour chacun. Les réponses deviennent plus comme un horizon vers lequel on tend plutôt que comme un résultat qu’on voudrait obtenir.
Pour aller plus loin, voici consultez nos ressources vidéos «Faire de la philo avec les enfants» et «La philosophie comme moyen d'aborder les sujets sensibles».

Liens avec le programme Culture et citoyenneté québécoise (CCQ)
1er cycle
Explorer des réalités culturelles et émotions collectives
- observer notre environnement immédiat (famille, école, quartier) et identifier des rituels, des célébrations ou des événements qui rassemblent, comme la fièvre du hockey.
- Reconnaître et nommer différentes émotions vécues lors de moments collectifs (joie, fierté, déception, etc.), à associer des réactions à ces émotions
Thématiques: Rituels et célébrations, Relations dans la famille et à l’école, expression des sentiments selon les personnes et les contextes, Conscience de soi et construction identitaire, connaissance de soi, champs d’intérêt et besoins individuels
2e cycle
Examiner les dynamiques de groupe et l’appartenance
- Analyser comment les émotions et les normes du groupe influencent nos comportements, le sentiment d’appartenance et parfois la pression de suivre la foule.
- Comparer différents points de vue (enthousiasme, indifférence, rejet) et à discuter des effets de mode et de la popularité dans notre environnement.
Thématiques: Dynamiques de groupe, sentiment d’appartenance, influence du groupe, effets de mode, inclusion et exclusion, différences et points communs entre les individus, appartenance culturelle, vie communautaire, héritage culturel au Québec.
3e cycle
Réfléchir de façon critique sur l’identité collective et les phénomènes sociaux
- Développer notre capacité à réfléchir de façon critique sur des réalités culturelles à l’échelle de la société québécoise, en s’interrogeant sur l’impact des passions collectives comme le hockey sur l’identité, la cohésion sociale et la diversité des opinions.
- Analyser les avantages et les limites de l’enthousiasme collectif, questionner la place des traditions sportives et discuter des risques liés à la pression de groupe ou à la marginalisation de ceux qui ne partagent pas la même passion.
Thématiques: identité individuelle et collective, diversité sociale et culture partagée, vie collective, participation sociale, valeurs personnelles et collectives, modèles culturels, traditions sportives, normes, pression du groupe, inclusion/exclusion.
Réalisé avec le soutien du