Atelier philo: Comment vivre au mieux la transition de l’adolescence?
Comme vous l’aurez peut-être vu sur Télé-Québec, une émission a débuté en ce début d’année 2024: être ado. En tant qu’enseignante, comme vous le savez, l’adolescence est un phénomène à la fois important et délicat à aborder. Si l’école secondaire est le lieu où l’adolescence va pleinement se déployer, ses prémisses s’inscrivent déjà à l’école primaire. Il vous revient donc d’aménager au mieux des moments permettant d’aborder cette thématique. De sorte que les enfants puissent poser de solides bases, façonner des repères stables et adoucir (autant que possible) les potentiels heurts de cette traversée qu’ils vont entamer.
Cette activité vous offre donc, dans un cadre structuré et régulé, une occasion de dialoguer avec vos élèves sur ce sujet dont l’importance n’a d’égal que la complexité.
Type de tâche: Atelier philo
Durée approximative: 60 minutes
Consigne
Faites lire à vos élèves l’article sur l’émission « Être ado » et l’entrevue avec Rachel-Andrée et Noah, deux des participants, tous deux réalisés par notre collègue Caroline.
Demandez-leur ensuite de formuler, par petite équipe de deux, une question philosophique sur le thème de l’adolescence.
Les critères d’une telle question sont simples:
- elle doit être ouverte
- elle n’a pas une seule «bonne» réponse ni de réponse définitive
- elle doit pousser à la réflexion
- elle doit être universelle (autrement dit, concerner tout le monde).
En choisissant une de leurs questions, proposez-leur alors un moment de discussion dont le but n’est pas de trouver la bonne réponse ni de convaincre les autres de penser comme elles ou eux. Mais plutôt de donner du sens, ensemble, à une question complexe.
Voici une liste de questions qui pourraient vous être utiles pour relancer les échanges de vos élèves. Vous n’êtes pas obligé.es de toutes les utiliser évidemment ! Vous êtes libres d’en piger quelques-unes, en fonction des directions empruntées avec vos élèves dans la discussion. En somme, elles sont juste là en cas de besoin, afin d’amener vos élèves à approfondir ou à nuancer leurs réflexions. Mais aussi à prendre conscience qu’ils sont capables d’embrasser une question complexe qui les concerne toutes et tous.
- Si vous deviez complétez cette phrase, quelle métaphore choisiriez-vous : «L’adolescence, c’est comme …» ?
- En quoi l’adolescence peut être comparée à une zone de turbulences?
- Qu’est-ce qui peut être utile quand on traverse une zone de turbulences?
- Quels sont les avantages et les inconvénients de devenir adolescent.e?
- Une adolescence idéale, ça ressemblerait à quoi?
- Des parents idéaux à l’adolescence, ça ressemblerait à quoi?
- Des amitiés idéales à l’adolescence, ça ressemblerait à quoi?
- Des amours idéales à l’adolescence, ça ressemblerait à quoi?
- Décider de la personne qu’on veut devenir, est-ce forcément facile?
- Comment faire pour embarquer dans l’adolescence avec confiance, plutôt qu’avec crainte?
- Qu’est-ce qui peut nous aider à trouver notre place à l’adolescence?
- Être adolescent, est-ce que ça peut s’apprendre?
Liens avec le programme
Le programme de CCQ fait la part belle à de nombreux thèmes qui gravitent autour de la transition et des multiples changements qui s’opèrent à l’adolescence. En 3e année, la question des âges de la vie est une des thématiques à aborder. Et au 3e cycle, sous l’intitulé les occasions de penser sa vie, émerge une thématique importante: le passage de l’enfance à l’adolescence.
Plus spécifiquement, en 4e année, les changements liés à la puberté, les sentiments (agréables et désagréables) à l’égard du fait de grandir, les inégalités de sexe et de genre, l’amitié et l’amour, les attitudes et les comportements qui influencent les relations interpersonnelles sont quelques-unes des thématiques mises en avant.
En 5e année, la puberté et les transformations physiques et identitaires (notamment le rapport aux adultes), la variabilité des éveils amoureux et sexuel, la prévention des agressions sexuelles et la sécurité personnelle (dans la vie réelle et dans l’univers virtuel), le consentement ou encore les contraintes et les responsabilités sont mises en lumière.
Plus largement, on suggère également de réfléchir aux attentes pour l’avenir, au passage au secondaire, à la projection de soi dans l’avenir, aux choix collectifs, aux changements climatiques et au développement durable. Enfin, une large part est accordée aux enjeux du numérique : ses fonctions (loisir, information, éducation, communication, mobilisation, etc.), mais aussi ses effets.
En d’autres termes, comme l’indique le programme : « La transition vers l’adolescence pose différentes questions importantes aux élèves : leur corps et leur identité sont en transformation, tout comme leurs relations avec les personnes de leur entourage, celles-ci leur laissant plus de liberté tout en exigeant une responsabilisation croissante. Les éveils amoureux et sexuel se produisent à différents moments et de manière variable selon les enfants. Le développement de leur autonomie et de leur utilisation des outils de communication numérique rend importante la poursuite d’une réflexion sur les situations d’agressions sexuelles et la sécurité personnelle. Déjà, le passage au secondaire s’invite dans les interrogations des élèves, qui se projettent dans l’avenir et prennent conscience d’objectifs personnels et d’attentes envers les autres et par rapport à l’avenir
En ce qui concerne les enjeux environnementaux, les élèves élargissent leur regard et peuvent s’interroger sur différentes notions qui interpellent les choix collectifs et la recherche du bien commun, à l’échelle nationale, régionale ou même locale, comme les changements climatiques, le développement durable ainsi que la protection du territoire et de la biodiversité au Québec. Enfin, les élèves s’interrogent sur les fonctions qu’ils attribuent au numérique dans leur vie et sur ses effets variés sur les modes de vie. Ils réfléchissent notamment au fait que les expériences et les usages du numérique peuvent être positifs ou négatifs, selon les contextes et les personnes, et que les paroles et les comportements numériques peuvent avoir des conséquences (notamment en matière de responsabilité criminelle) »
Si vous n’avez jamais mené de discussion philo avec vos élèves, voici quelques repères pour que celle-ci se déroule au mieux.
La philo : comment on fait ?
- Faire de la philo ce n’est pas juste parler, discuter ou dire ce qu’on pense. Ce n’est pas non plus empiler ou juxtaposer des opinions ou des idées, en prenant un air sérieux. C’est autre chose: il s’agit plutôt d’un dialogue, où on essaie de penser ce qu’on dit. Et pas juste de dire ce qu’on pense !
- Pour penser de façon critique, on peut s’appuyer sur des habiletés de pensée comme: définir les mots dont on parle, donner des exemples et des contre-exemples, mais aussi réfléchir aux conséquences et aux implications de ce qu’on dit.
- D’autres aptitudes sont importantes à développer : reformuler ses idées ou celles des autres (pour s’assurer qu’on se comprend bien), donner des raisons quand on avance une idée, ou encore identifier des critères permettant de classer nos idées et de les distinguer entre elles.
- En philosophie, il est primordial de se méfier des évidences, des réponses toutes faites et des vérités qu’on voudrait nous imposer. On essaie autant que possible de décrypter et de déconstruire les préjugés, les stéréotypes et idées présentées comme «l’évidence», le «gros bon sens» ou «ce que tout le monde sait».
- En philosophie, le but n’est pas de convaincre, mais de comprendre. C’est aussi de comprendre en quoi les sujets dont on parle et les questions qui en découlent nous concernent tous et toutes.
Une chose essentielle : on découvre petit à petit qu’il est impossible (et heureusement !) d’arriver à des réponses qui sont «bonnes», définitives ou identiques pour chacun. Les réponses deviennent plus comme un horizon vers lequel on tend plutôt que comme un résultat qu’on voudrait obtenir.
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