Quand un reportage fait bouger les choses!
En avril dernier, nos collègues journalistes des Coops de l’information ont publié une enquête révélant que les poubelles des magasins Couche-Tard contenaient plein de produits encore bons. Cette histoire a tellement fait réagir que peu de temps après, un projet de loi appelé «Loi Couche-Tard» a été créé par des politiciens québécois! Comment fonctionne exactement le journalisme d’enquête? À quoi ça sert? Je me suis entretenue avec Patrice Gaudreault, journaliste d’enquête pour les Coops de l’information et directeur de leur Équipe d’impact. Il nous révèle tous ses secrets… ou presque!
Comment s’est déroulée votre enquête sur les ordures de Couche-Tard?
Le point de départ était en janvier 2023. Notre journaliste Marc Allard est allé rejoindre une personne qui faisait du «dumpster diving» (ça consiste à fouiller les poubelles des épiceries pour récupérer la nourriture jetée mais encore bonne à manger). Ils sont tombés sur le conteneur à déchets d’un Couche-Tard. Il était rempli de boissons gazeuses, de pintes de lait et de bouteilles d’eau… encore pleines! On parle ici de centaines de contenants jamais ouverts.
Alors, plusieurs soirs par semaine pendant plus d’un mois, avec mes collègues, nous sommes allés ouvrir les conteneurs à déchets de plusieurs Couche-Tard dans différentes régions du Québec. Nous avons découvert, encore une fois, des centaines de bouteilles de boissons gazeuses et des cartons de lait non périmé. Tout était recyclable, mais se trouvait dans les poubelles!
Il existe plus de 800 magasins Couche-Tard dans tout le Québec! On compte en plus 8000 succursales dans le reste du Canada et aux États-Unis!
Quel impact a eu votre enquête?
Le plus gros impact qu’on a pu observer est que deux partis politiques, Québec Solidaire et le Parti Québécois, ont déposé des projets de loi contre le gaspillage alimentaire. Il y en a même un qui a pris le nom de «Loi Couche-Tard»! Avant la publication de l’article, il n’y avait pas de loi anti-gaspillage au Québec. C’est donc une belle fierté de voir l’impact qu’une enquête journalistique puisse avoir. C’est d’ailleurs de là qu’on prend notre nom, «Équipe d’impact des Coops de l’information», parce que l’objectif réel est d’avoir de l’impact sur nos communautés, nos régions, mais aussi sur nos élus.
Est-ce qu’il y a des choses que vous devez garder secrètes lors de vos enquêtes?
Oui, les sujets de nos enquêtes sont secrets. À part les membres de l’équipe, on peut compter sur les doigts de la main les gens qui savent sur quoi on travaille. Dans le cas de Couche-Tard, ma famille était dans le coup. Mes enfants trouvaient bien intéressant de me voir partir le soir pour faire la tournée des conteneurs à déchets. Un vrai travail d’enquêteur! Le matin, ils écarquillaient les yeux en voyant les photos de nos découvertes.
Et toi, penses-tu que le journalisme peut avoir un impact? Lequel?