Il est une fois: Les naufragés que (presque) personne ne voulait sauver
Frédérick Lavoie, journaliste et auteur, aime fusionner journalisme et littérature. Laisse-le te raconter un véritable récit à la manière d’un conte. Parfois, la réalité surpasse l'imaginaire!
Il est une fois à notre époque 17 jeunes hommes partis en bateau en quête d’un avenir meilleur.
Leur plan était simple: naviguer jusqu’à atteindre l’autre rive de la mer, où ils pourraient refaire leur vie dans un pays plus riche et plus libre que le leur.
Ce périple ne devait pas prendre plus de 24 heures. Des milliers d’autres avant eux avaient réussi ce même voyage. Mais la traversée comportait aussi des risques. Souvent, les bateaux étaient interceptés par les gardes-côtes (les policiers de la mer), qui les renvoyaient dans leur pays. Car selon la loi, ce type de traversée était illégal.
Un plus grand danger encore était celui d’un naufrage. Beaucoup de gens disparaissaient ainsi en mer quand leur bateau chavirait.
Mais le voyage s’annonçait facile pour ces 17 jeunes hommes. La mer était calme ce jour-là. Ni grosses vagues, ni tempête à l’horizon.
Tout allait bien, jusqu’à ce que soudain… pout… au milieu de la mer… pout pout poummmm… le moteur de leur bateau tombe en panne.
Impossible de le redémarrer. Et il n’y avait pas de radio à bord pour appeler les secours.
Heureusement, beaucoup de bateaux traversaient cette mer. Des bateaux de pêche, de plaisance, et de très grands cargos transportant de la marchandise.
Chaque fois que l’un de ces navires passait près d’eux, les jeunes hommes agitaient les bras et des vestes de sauvetage pour attirer son attention.
Mais bizarrement, aucun bateau ne s’arrêtait.
Était-ce parce que les capitaines ne les voyaient pas? Ou parce qu’ils ne voulaient pas les voir …???
Au bout de quelques heures, les petites réserves de nourriture et d’eau à bord se sont épuisées.
Rapidement, l’un des jeunes hommes a commencé à se sentir très mal. Il avait besoin de nourriture et de médicaments.
Malheureusement, il est mort.
2 jours, 3 jours, 4 jours ont passé.
Le matin du cinquième jour, les jeunes hommes ont aperçu un autre navire. Un petit voilier. Sans grand espoir, ils se sont mis une fois de plus à faire de grands gestes dans sa direction.
Miracle! Cette fois, le voilier a changé sa trajectoire pour se diriger vers eux!
À bord se trouvaient trois hommes. Des navigateurs de compétition. Ils traversaient eux aussi la mer, mais pour une raison bien différente. Ils venaient de terminer une course de voiliers et s’en allaient participer à une autre.
Arrivés près de l’embarcation en panne, ils ont lancé des bouteilles d’eau et des paquets de nourriture pour les 16 survivants assoiffés et affamés.
Et puisqu’ils ne pouvaient pas faire monter autant de monde sur leur petit voilier, ils ont appelé avec leur radio un vrai bateau de secours.
Deux heures plus tard, les 16 survivants ont pu être transportés sur la terre ferme.
Mais une question demeurait: pourquoi personne d’autre ne s’était arrêté pour aider ces humains en détresse? Pourquoi seuls les trois navigateurs sur leur petit voilier étaient venus à leur secours?
Impossible de le savoir avec une certitude absolue. Ce que nous savons toutefois, c’est que souvent, les gros navires transportant de la marchandise évitent de s’arrêter car cela provoquerait un retard dans leur livraison et leur coûterait très cher…
Cette histoire est vraie! Le 7 octobre dernier, le skipper (capitaine de voilier) professionnel français Thibaut Vauchel-Camus et ses deux assistants ont porté assistance à une embarcation à la dérive en mer Méditerranée. À bord se trouvaient 16 Algériens qui cherchaient à rejoindre la côte de l’Espagne. Même s’il est obligatoire de secourir des gens en détresse, les grandes compagnies de transport demandent aux marins de ne pas aider les migrants pour éviter les retards et les problèmes.
Sources: Libération, Paris-Normandie, Ouest-France, The Load Star.