
Un message d’Audrey-Lise au sujet du racisme envers les Autochtones
Et si je te racontais un peu ce que je ressens ces derniers temps…
Kuei, je m’appelle Audrey-Lise. Je suis innue et ces jours-ci, j’ai le cœur qui me serre.
Depuis que le projet de loi 97 a été déposé, quelque chose a changé dans l’air. C’est un projet sur les activités dans la forêt, comme les coupes d’arbres. Mais les Premières Nations n’ont pas été consultées pour créer ce projet de loi.
Pourtant, ce sont nos territoires traditionnels qui sont directement concernés. Là où nos familles ont grandi. Ce sont des endroits où nos ancêtres ont marché, chassé, élevé leurs enfants, où nos familles vivent encore aujourd’hui. Ce n’est pas juste une question d’arbres ou de bois, c’est une question de lien avec le Nitassinan, notre terre, de respect et d’écoute. Ce territoire, c’est une partie de nous.
Comme tu as pu le lire dans l’article de Clémence, des Autochtones ont décidé de manifester contre ce projet de loi. Ils jugent que les forêts sont en danger. Pour protester, ils bloquent les routes qui mènent aux chantiers des compagnies forestières. Et cela crée des tensions entre les travailleurs forestiers et les manifestants autochtones.

Une route bloquée en réaction au projet de loi sur les forêts, en Mauricie
Tristement, ce conflit a entraîné une vague de racisme contre les Autochtones. Je n’ai jamais rien vu de tel auparavant.
Je le sens. On le voit dans les commentaires qui circulent sur les réseaux sociaux. Des gens qui répètent encore des idées fausses sur nous:
«Ils ne veulent jamais collaborer. Ils bloquent tout. Ils ont déjà assez d’avantages. Ils ont tout gratuit. Ils agissent comme des sauvages, etc.» Ils oublient que le droit de manifester existe pour tous au pays.
Des enfants affectés
Encore plus malheureux: ce climat malsain a des impacts chez des enfants de ton âge. Je vois de jeunes Autochtones qui ont peur d’aller à l’école parce qu’ils se sentent jugés et méprisés. Je vois des familles qui hésitent à se rendre dans des villes voisines par crainte de se faire dévisager ou dénigrer.
Il y a des familles qui aimeraient aller aux pow-wow d’Opitciwan et de Wemotaci, en septembre. Ce sont deux communautés qui ne sont accessibles que par des chemins forestiers. Un chemin forestier, c’est une route de terre ou de gravier qui passe au milieu des arbres, loin des villes. Ce n’est pas une autoroute. On y croise surtout des camions qui transportent le bois qui provient de nos territoires et des animaux sauvages.
Ces routes devraient mener à la célébration, à la danse et à la joie. Et pourtant, plusieurs craignent maintenant d’emprunter ces mêmes routes parce qu’ils ont peur d’être intimidés par des travailleurs forestiers.
À toi qui me lis
Tu sais, le racisme, même quand il est caché dans des lois ou des rumeurs, il blesse pour vrai.
Tout ce que je souhaite, c’est que toi, en lisant ceci, tu comprennes mieux.
Le problème, ce n’est pas la forêt. Ce ne sont pas les lois, ce ne sont même pas les désaccords. Le vrai problème, c’est quand on oublie d’écouter les autres, qu’on parle à leur place, qu’on décide pour eux, et qu’on oublie que derrière chaque loi, chaque mot, il y a des humains derrière.
Aujourd’hui, j’espère t’avoir appris quelque chose. Peut-être que demain, ce sera toi qui pourras corriger une fausse idée ou simplement rappeler aux autres qu’on est là, qu’on existe, et qu’on a notre place.
Parce qu’ensemble, on peut changer bien des choses et peut-être que ce sera toi qui feras la différence, un jour.
Qu’est-ce que toi, tu pourrais faire pour aider à ce que tout le monde se sente respecté?