Passion: poubelles!
Simon Paré-Poupart a un emploi qu’il adore depuis 20 ans. Il est vidangeur! C’est un métier mal connu et pas très valorisé. C’est pourquoi il a décidé d’écrire un livre sur sa vie passée à courir derrière un camion: Ordures! Journal d'un vidangeur. J’ai eu la chance de parler avec ce passionné! Voici ce qu’il m’a dit.
Vidangeur ou éboueur?
J’ai demandé à Simon s’il préférait qu’on dise qu’il est vidangeur ou éboueur. «Vidangeur. Sur le terrain, on dit vidangeur. Sur les documents officiels, c’est éboueur. Les Français disent éboueur ou ripeur.»
Simon, raconte-moi tes débuts dans le métier.
J’avais 18 ans, j’étudiais au cégep et je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire dans la vie. J’étais un intellectuel et je jouais aux cartes Magic et Pokémon. Mon beau-père m’a mis au défi de trouver un emploi qui me ferait travailler fort physiquement et m’a proposé d’aller collecter les ordures. Ça a été un coup de foudre!
Pourtant, ça semble être tellement difficile: courir pendant plusieurs heures, beau temps, mauvais temps, et soulever des sacs lourds… et puants! Qu’est-ce qui explique ce coup de foudre?
Ça a vraiment été une belle piqûre! Ça m'a fait réaliser à quel point j'étais chanceux d’étudier, de vouloir être un intellectuel. Quand on grandit, on est pris un peu dans notre milieu social. Pour moi, c'était comme une façon de faire un stage dans un autre monde.
J’ai réalisé que pendant que j'étais assis sur les bancs d'école, il y avait des gens qui travaillaient pour moi. Des gens qui maintiennent la société active pour que d’autres puissent étudier. Les vidangeurs, les chauffeurs d’autobus, les préposés aux bénéficiaires, par exemple. Tous des métiers peu aimés, mais cruciaux!
Tu as fait tes études en sociologie et en gestion à l’université. Tu travailles comme intervenant social pour la Croix-Rouge, entre autres. Et tu es papa de deux petites filles. Et tu continues quand même à travailler comme vidangeur 3 jours par semaine. Pourquoi?
C’est un emploi qui me permet de rester en forme et de me dépenser. Il y a aussi tout ce que je récupère comme objets. Si je marche dans la rue, il y a de bonnes chances que je ramasse un déchet et que je le ramène chez nous. J'ai développé un oeil pour revaloriser tout ce que je vois.
Tu gardes des choses que tu trouves dans les ordures? As-tu fait des découvertes surprenantes?
On trouve de tout. J’ai trouvé de l’or dans les poubelles! Et une Nintendo Switch en parfait état. Mon beau-père se cherchait une glacière, je lui en ai trouvé 4!
Qu’est-ce qui a changé depuis les 20 dernières années dans le monde des poubelles?
L’arrivée des bacs (poubelles, recyclage et compost). Avec les bacs, on ne voit plus les sacs poubelles. Les ordures «disparaissent» dans un contenant rigide et «propre». En plus, les gens y mettent n’importe quoi sans que ça se voie. Et avec les différentes collectes, les déchets se déplacent d'un bac à l'autre, mais ils ne diminuent pas nécessairement.
Ce n’est pas un métier très valorisé. Mais tu remarques que les enfants ne réagissent pas comme les adultes. Explique-moi.
Avant l’âge scolaire, les enfants n’ont pas vraiment conscience des normes de la société: la mode, les salaires, les classes sociales, etc. Ils sont souvent fascinés par les vidangeurs. Ils voient des gars accrochés à un gros camion, qui courent dans la rue. Ils lancent des sacs, ils sont sales. Ils sont très différents des autres adultes qu’ils côtoient. Ça les fascine.
Les gens ne sont pas toujours très polis avec les vidangeurs. Ils s’impatientent contre le camion qui bloque la circulation. Ou ils font comme si vous étiez invisibles. Comment aimerais-tu que les gens agissent envers vous?
Sentir qu’on est apprécié, ça change tout! Parce que nous, on sait qu’on rend service aux citoyens. Les enfants le font bien: ils nous sourient, nous envoient la main. Ça fait vraiment plaisir. On ne se sent pas invisible.
Toi, étais-tu fasciné par le camion poubelle quand tu étais petit?