Il est une fois à notre époque un arbre majestueux, aimé de tout le monde.

Durant environ 300 ans, cet érable sycomore a vécu dans un parc national, bien droit entre deux collines traversées par les ruines en pierre d’une ancienne civilisation.

Peu importe la saison, cet érable sycomore semait la joie et l’harmonie. Les promeneurs et les promeneuses s’arrêtaient près de lui pour pique-niquer, discuter, se reposer, ou simplement trouver protection sous son feuillage contre la pluie ou le soleil ardent.

Quand la photographie a été inventée, les gens se sont mis à le photographier dans toutes les circonstances: par temps clair ou nuageux, par une nuit étoilée, sous la neige, après la pluie quand un arc-en-ciel venait relier les deux collines au-dessus de l’érable, ou encore lorsque des aurores boréales faisaient danser les cieux au-dessus de sa cime.

Si bien qu’au fil du temps, cet érable sycomore est devenu l’un des arbres les plus populaires de son pays. Il est même apparu dans un grand film d’Hollywood!

Le paysage qu’il créait était si magnifique, si inspirant, que des amoureux se rendaient souvent à ses pieds pour faire leur demande en mariage. 

Mais si nous parlons désormais de cet arbre au passé, c’est qu’un jour, ou plutôt une nuit, un grand malheur s’est produit: l’érable sycomore bien-aimé a été abattu à la tronçonneuse.

Par qui? Pourquoi? Mystère. 

Tout ce que la police a pu dire, c’est qu’il s’agissait très certainement d’un acte de vandalisme. Ou pour le dire autrement: d’un acte de pure méchanceté.

Car les malfaiteurs n’ont rien emporté de l’arbre. Ils n’ont pas cherché à en faire du bois de chauffage ou à le transformer en meuble. Ils semblent l’avoir abattu… pour rien.

Au petit matin, des passants ont retrouvé le grand corps de l’érable affalé au milieu des deux collines. Son beau grand corps, sans vie… ou presque.

Car c’est ici qu’entre en scène Rachel, une horticultrice habitant près du parc, et aussi une grande amoureuse de l’arbre. 

En apprenant la nouvelle, Rachel s’est dépêchée de se rendre sur les lieux du crime. Elle a grimpé dans les feuillages de l’arbre au sol pour cueillir des scions, c’est-à-dire les branches les plus jeunes, qui comptent aussi des bourgeons.

En tant que spécialiste, Rachel savait une chose: les arbres meurent tranquillement. Dans les heures suivant l’abattage, la vie persiste encore dans leurs extrémités.

Une fois les scions recueillis, Rachel s’est dépêchée de les envoyer à ses collègues dans un laboratoire. 

Là-bas, ils ont utilisé les scions pour faire… des greffes! C’est une technique très très ancienne qui permet de faire renaître un arbre à partir d’un autre. Les horticulteurs ont ainsi joint les petites branches de l’érable bien-aimé à de minuscules racines d’érable encore naissantes. Grâce à ces racines, les petites branches devraient pouvoir continuer à grandir.

Mais attention: ce type de greffe ne fonctionne pas à tous les coups. En cas de succès, cela prendra tout de même des années, des décennies ou peut-être même des siècles avant que les petites branches se transforment en un arbre aussi majestueux que celui qui a été abattu.

Tout de même, pour Rachel, ses collègues horticulteurs et toutes les personnes qui adoraient cet érable sycomore si spécial, il existe maintenant un espoir de le voir un jour ressusciter… et peut-être même reprendre sa place dans le paysage, entre les deux collines du parc.